Nos enfances...

@René d'Anjou... Je viens de lire les textes précédents. Effectivement, il semble que bien peu de personnes aient eu le bonheur d'avoir une enfance merveilleuse même dans sa simplicité la plus pure. Mon enfance n'a pas été ce qu'elle "aurait" dû être à cause de la maladie de mon frère aîné. Je suis persuadée que nous aurions eu une enfance agréable sinon heureuse dans d'autres circonstances. J'ai eu la chance de recevoir une certaine "éducation" ce qui m'a permis de comprendre rapidement "pourquoi" mon quotidien n'avait rien de comparable avec celui de mes amies de classe. Et aucun de nous n'en a jamais voulu à notre frère ni même, à notre mère qui était d'une sévérité extrême. Il suffit de s'imaginer que l'on vit avec un très grand malade, qui ne doit jamais rester seul... à temps plein... et on devine la suite. Le stress permanent dans lequel on vit... La première à en souffrir en "silence"... était ma mère. Je l'ai compris plus tard. J'étais trop jeune pour réaliser ce qu'elle vivait. J'ai pris ma vie en main vers l'âge de 16ans parce qu'il le fallait pour évoluer. Et j'y suis arrivée. Quand un enfant est gravement malade, il occupe tout l'espace de la famille. Il est prioritaire sur tout... Même si les parents sont merveilleux avec les autres enfants, on ne peut rien y changer, c'est logique et normal. Nous étions élevés avec l'idée qu'un jour notre frère ne serait plus là. C'était ça... notre quotidien. Lorsqu'on rentrait de l'école, on ne savait jamais s'il était à la maison ou hospitalisé...
J'ai eu ma fille à l'âge de 30ans. Née avant terme et toujours malade... Opérée d'un cancer à l'âge de 20ans. Elle s'en est sortie. Elle est maintenant maman d'une petite-fille de 1 an, elle-aussi grand prématurée. Ma fille a 32ans... Non... jamais je n'ai reproduit le schéma de mon enfance. Je m'étais promis d'être vigilante sur ce point. Sa chambre débordait de livres, jamais je ne lui ai fais de remarque parce qu'elle lisait beaucoup... tout ce qui était ludique et éducatif, elle l'a eu et plus encore. Nous discutions toujours et de tout et mon mari participait dès qu'il était présent. Nous n'étions que 3 et nous étions très ouverts. Aucun sujet n'a été épargné. Bien sur en termes corrects et adaptés à son âge. Elle m'a fait plaisir récemment en disant naturellement : "je souhaite à tous les enfants du monde d'avoir la même jeunesse que moi !"... j'ai senti mon coeur se serrer mais je n'ai rien dit. Son cancer est bien loin maintenant... clairement ! Elle parle vraiment des moments positifs de sa jeunesse quand elle dit ça. Je suis moi-même quelqu'un qui regarde devant. Je parle de tout, sans détours. De mon passé, de mes souvenirs heureux ou malheureux, le plus naturellement du monde. C'est la vie. Pourquoi la cacher ? Enjoliver les choses ne changera pas le passé. Exagérer l'avenir est inutile... alors, je suis naturelle.
C'est cette enfance qui m'a forgée et je ne regrette rien. :timid: 😐